
La Chine a commencé à déployer les premiers satellites de ses grandes constellations pour apporter une connexion haut débit depuis l’orbite basse, en concurrence avec les 8 000 satellites Starlink de SpaceX. Mais il y a un problème dans les déploiements chinois qui pourrait être très dangereux pour l’avenir de l’orbite basse.
La Chine compte plusieurs projets de connectivité à haut débitdébit depuis l’espace, à l’instar du service StarlinkStarlink de SpaceXSpaceX ou du Projet Kuiper d’Amazon. Ces services reposent sur des centaines voire des milliers de satellites en orbite basse, entre 500 et 1 500 kilomètres d’altitude, afin de garantir une connexion haut débit en continu pour l’utilisateur sur Terre.
Deux constellations sont déjà en cours de déploiement : le projet gouvernemental Guowang piloté par la filiale étatique SatNet (13 000 satellites) et le projet Qianfan – alias G60 – soutenu par Shanghai (12 000 satellites). D’autres projets sont à venir, notamment du côté de la compagnie privée Landspace avec 10 000 satellites.
Gros débris spatiaux à venir
La mise en orbite des constellations satellites chinoises pose un problème majeur de gestion des débris spatiaux dangereux à cause de l’ancienneté du design de la plupart des fuséesfusées du pays, et en particulier de leur étage supérieur qui reste souvent en orbite, parfois pendant des décennies.
Le ou les premiers étages d’une fusée servent à décoller de la Terre et à gagner suffisamment de vitesse avant de passer à la mise en orbite. Cette tâche est celle de l’étage supérieur – auquel sont attachés les satellites passagers – qui se place en orbite avant d’éjecter les charges utiles.
Aujourd’hui, il est courant de ne plus laisser en orbite l’étage supérieur d’une fusée car il devient alors un débris spatial très dangereux avec des risques de fragmentation par l’explosion d’une batterie ou d’un réservoir de carburant, générant de nombreux autres débris spatiaux également dangereux. Il est donc désormais d’usage qu’après la mise en orbite, l’étage supérieur du lanceur brûle ses dernières réserves de carburant pour se désorbiter ou pour partir dans une orbite « cimetière ».
Le problème avec les lanceurs chinois est que leur design plus ancien ne leur permet pas systématiquement de réaliser cette manœuvre de désorbitation, à l’exception de la puissante Long March 5, qui servira à mettre en orbite plusieurs satellites Guowang. Mais les autres lanceurs, comme les Long Mach 6 ou 8, qui seront fréquemment utilisés pour les constellations, laisseront leur étage supérieur devenir un débris spatial, et pendant longtemps.
Des débris qui restent en orbite pendant plus de 100 ans
Plus de 100 ans, c’est l’estimation calculée par le spécialiste du trafic spatial Jim Shell, car les orbites visées par Guowang et Qianfan sont entre 700 et 1 000 kilomètres d’altitude. Or, la rentrée atmosphérique d’un objet spatial peut être naturellement garantie 25 ans après sa fin de mission grâce au dragage provoqué par des particules d’air qui circulent au-delà de la limite de notre atmosphèreatmosphère. Vingt-cinq ans, c’est l’effort minimum souhaité par l’usage actuel. La tendance est de pouvoir garantir la rentrée atmosphérique au bout de cinq ans.
Au-delà de 700 kilomètres, le débris peut rester en orbite pendant un siècle avant de redescendre naturellement car il n’y a quasiment plus de dragage atmosphérique. Shell a estimé qu’il faudrait plus d’un millier de fusées chinoises pour déployer Guowang et Qianfan, ce qui va drastiquement multiplier le nombre de débris spatiaux dangereux en orbite basse. La Chine affirme avoir sa propre politique de gestion des débris spatiaux. Reste à voir comment les Chinois peuvent gérer ce problème qui devient urgent.
Auteur : Daniel Chrétien, Rédacteur scientifique
Aller à la source