Au cœur d’un système galactique énigmatique appelé le Fer à cheval cosmique, des astronomes ont récemment découvert un trou noir ultra-massif d’une taille époustouflante qui fait 36 milliards de fois la masse de notre Soleil. Cette découverte, annoncée dans une étude publiée en janvier, marque un tournant dans notre compréhension des trous noirs et de leur rôle dans l’évolution des galaxies.
Le Fer à cheval cosmique
Le Fer à cheval cosmique n’est pas un objet unique, mais un système de lentilles gravitationnelles. Découvert en 2007, ce phénomène rare se produit lorsque la lumière d’une galaxie située en arrière-plan est déformée et amplifiée par la gravité d’une autre galaxie située au premier plan. Ce processus, qui déforme l’image de la galaxie lointaine comme à travers une loupe, est connu sous le nom de lentille gravitationnelle. Le Fer à cheval cosmique tire son nom de la forme de l’anneau d’Einstein qui se forme lorsqu’une galaxie éloignée est parfaitement alignée avec une galaxie au premier plan.
Ce phénomène a déjà fourni aux astronomes des informations précieuses sur des galaxies situées à des distances impressionnantes. Toutefois, la découverte récente d’un trou noir ultra-massif au centre de ce système a ajouté une nouvelle dimension à cet objet céleste déjà fascinant.
36 milliards de soleils
Le trou noir en question se trouve au centre de LRG 3-757, une galaxie extrêmement massive qui fait partie du Fer à cheval cosmique. Avec une masse estimée à 36 milliards de masses solaires, ce trou noir est l’un des plus massifs jamais observés. Pour vous donner une idée, la plupart des trous noirs supermassifs observés jusqu’à présent pèsent généralement entre 100 millions et quelques milliards de masses solaires.
Fait intéressant : la masse énorme du trou noir du Fer à cheval cosmique ne correspond pas à la relation généralement observée entre la masse d’un trou noir et la dispersion de la vitesse des étoiles dans la galaxie qui l’héberge. En effet, une loi physique bien établie, la relation MBH-σe, stipule que plus la masse d’un trou noir est grande, plus les étoiles qui l’entourent ont une grande dispersion de vitesse (c’est-à-dire qu’elles se déplacent plus rapidement et de manière plus chaotique).
Cependant, les astronomes ont constaté que ce trou noir déviait de cette règle. La dispersion de vitesse dans la galaxie LRG 3-757 est en effet bien plus faible que prévu pour une galaxie qui abrite un trou noir aussi massif. Cette déviation, dite découplage de la relation MBH-σe, suggère que d’autres facteurs pourraient intervenir dans l’évolution de ce système particulier.

Pourquoi ce découplage est-il important ?
Ce découplage remet en question une vision bien établie de l’évolution des galaxies et de leurs trous noirs. La découverte soulève des questions sur le rôle des fusions galactiques, des processus de rétroaction des trous noirs et de la manière dont les galaxies massives évoluent au fil du temps. L’un des scénarios envisagés par les chercheurs est que LRG 3-757 pourrait faire partie d’un groupe fossile, une sorte de vestige d’un groupe de galaxies qui a cessé de se former depuis longtemps, ce qui expliquerait la faible dispersion de vitesse.
Les groupes fossiles sont des structures rares constituées de galaxies massives isolées. Ces galaxies ont souvent cessé leur formation d’étoiles, ce qui les rend plus anciennes et moins dynamiques. Si LRG 3-757 fait partie d’un groupe fossile, cela pourrait expliquer pourquoi la galaxie est plus calme que ce que l’on attend d’une galaxie contenant un trou noir aussi massif.
Une autre hypothèse repose sur les fusions galactiques. Lors de la fusion de deux galaxies massives, le processus appelé raclage peut se produire. Cela consiste en l’expulsion d’étoiles des régions centrales de la galaxie fusionnée, ce qui pourrait réduire la dispersion de vitesse des étoiles tout en préservant la masse du trou noir. Ce phénomène pourrait également contribuer au découplage observé dans la relation MBH-σe.
En somme, la découverte du trou noir ultra-massif du Fer à cheval cosmique a des implications profondes pour notre compréhension des trous noirs et de leur relation avec les galaxies. Cette découverte remet non seulement en question certains modèles actuels, mais elle ouvre aussi la voie à de nouvelles recherches.