Des molécules liées à la vie ont été détectées dans l’atmosphère d’une exoplanète, K2-18b, située à 124 années-lumière de nous. Grâce au télescope spatial James Webb, cette avancée représente peut-être le pas le plus décisif jamais franchi dans la quête d’une vie extraterrestre. Et cette fois, les indices sont plus que troublants…
K2-18b, une planète pas comme les autres
L’exoplanète K2-18b n’est pas nouvelle pour les scientifiques. Découverte en 2015, elle intrigue depuis plusieurs années pour une raison simple : elle se situe dans la “zone habitable” de son étoile, c’est-à-dire à la bonne distance pour que de l’eau liquide puisse exister à sa surface.
Mais ce n’est pas tout. K2-18b serait ce qu’on appelle un “monde hycéen”, un type de planète encore hypothétique mêlant océan global et atmosphère riche en hydrogène. Une combinaison qui pourrait, selon les théoriciens, favoriser l’émergence ou le maintien de formes de vie, peut-être très différentes de celles que nous connaissons sur Terre.
Elle est environ 2,6 fois plus grande que la Terre et 8,6 fois plus massive, ce qui en fait une “super-Terre” ou une “mini-Neptune”, des catégories encore mal comprises. Mais jusqu’ici, aucune preuve concrète ne venait étayer l’hypothèse d’une biosphère.
Des molécules jamais vues ailleurs (et très suspectes)
Tout a changé avec les récentes observations du télescope James Webb. En 2023, une première étude avait déjà mis en évidence la présence de méthane et de dioxyde de carbone dans l’atmosphère de K2-18b — deux composés liés à l’activité biologique sur Terre. Mais surtout, un signal faible mais intrigant de DMS (sulfure de diméthyle) avait été détecté.
En 2024, rebelote, mais avec une analyse bien plus poussée, cette fois grâce à l’instrument MIRI du JWST. Résultat : un signal chimique beaucoup plus net, correspondant non seulement au DMS mais aussi à son cousin, le DMDS (disulfure de diméthyle).
Et c’est là que les choses deviennent sérieuses. Sur notre planète, ces deux molécules sont produites uniquement par la vie, notamment par les algues marines et certains microbes. Aucun processus géologique ou chimique connu ne les génère naturellement en grandes quantités sans l’intervention d’organismes vivants. C’est donc une biosignature possible, et sans doute la plus prometteuse jamais observée jusqu’ici.
Une découverte scientifique sérieuse, mais encore fragile
Même si les résultats rapportés dans The Astrophysical Journal Letters sont excitants, les chercheurs restent prudents. Le signal chimique atteint une signification de 3 sigma — ce qui signifie qu’il n’y a que 0,3 % de chance que ce soit un hasard.
Attention : cela ne veut pas dire qu’il y a 99,7 % de chances que ce signal soit causé par la vie, mais qu’il y a 99,7 % de chances que le signal soit réel.
Si c’est loin d’être négligeable, ce n’est donc pas encore suffisant pour valider une découverte de cette ampleur. La barre est généralement fixée à 5 sigma, soit une probabilité inférieure à 0,00006 % d’erreur.
En parallèle, il reste possible, bien que très hypothétique, que des réactions chimiques encore inconnues puissent produire du DMS et du DMDS sans vie. Les scientifiques veulent donc tester ces hypothèses, notamment en laboratoire, pour mieux comprendre ce qui est réellement en jeu.
Comme le souligne le chercheur Nikku Madhusudhan, « il est important d’être sceptique face à nos propres résultats. C’est en répétant, en testant, qu’on avance. »

Et si nous n’étions pas seuls dans l’univers ?
Ce que cette découverte change, c’est avant tout notre perspective. Pour la première fois, les conditions propices à la vie ne sont plus une abstraction, mais un cas bien réel, associé à des indices tangibles.
K2-18b devient ainsi la candidate n°1 dans la quête d’une biosphère extraterrestre. Et ce n’est qu’un début : avec ses instruments ultra-sensibles, le télescope James Webb va continuer à observer cette planète, à collecter de nouvelles données et à affiner les mesures.
S’il parvient à confirmer ces résultats — voire à détecter d’autres composés liés à la vie — cela pourrait ouvrir une ère totalement nouvelle pour l’astronomie, l’astrobiologie… et notre compréhension de nous-mêmes dans l’univers.
Car si la vie peut apparaître ailleurs, dans des conditions très différentes de celles de la Terre, alors il est probable qu’elle soit répandue. Et que nous ne soyons ni uniques, ni seuls.